Quelques repères lexicographiques
sur l’administration nazie

Sur les différents sigles concernant les institutions nazies :
  • Abwehr
    Service de renseignement de l’armée allemande, la Wehrmacht. L’ Abwer fut absorbée par le Service de Sécurité de la Gestapo, le Sicherheitsdenst, S.D. en 1944.
  • Geheim­feldpolizei
    Ensemble des services policiers de l’Abwehr : la Police secrète de campagne et la Feldgendarmerie, Gendarmerie de campagne.
  • Gestapo
    Geheime Staats Polizei, police secrète d’Etat, chargée de réprimer tous les opposants au règime nazi.
  • K.L.
    Staatuche Konzentrationslager, sigle officiel ; K.Z., sigle familier : Camps de concentration d’État, orga­nisés, après 1934, sur le modèle de Dachau et gérés par un organisme dirigé par le S.S. Oswald Pohl, à partir de 1942. Ils étaient fournis en détenus par la Gestapo. Cette double dépendance de la Gestapo et d’une instance de la S.S. est la caractéristique officielle des K.L. stricto sensu. Chaque K.L. comprenait un camp central, des kommandos intérieurs constitués dans le camp, et des kommandos extérieurs souvent éloignés du camp.
  • Kommando
    Au sens de commandement, le terme entre dans la composition de l’intitulé de différents organismes militaires (O.K.W., O.K.H., O.K.L., 0.K.M.…).Au sens de détachement, le terme désigne l’équipe à laquelle est assignée une tâche sous la conduite d’un Kapo, Arbeitskommando – le Kommando de travail, ou un des camps annexes essaimés par les K.L. dans le cadre de la Guerre totale, Aussenkommando, le Kommando extérieur.
  • N.N
    les 7 et 12 décembre 1941 était promulguée une série de trois décrets dits décrets Keitel (chef du Haut Commandement de la Wehrmacht) décrets dits aussi Nacht und Nebel erlass, N.N. ne signifiant peut-être pas, à l’origine, Nuit et brouillard – expression qui serait reprise de l’opéra de Richard Wagner, l’Or du Rhin ; mais Nomen Nescio : je ne sais pas son nom. Par ces décrets était instituée une procédure judi­ciaire particulière destinée à terroriser les populations ­ dans les pays occupés. Ainsi, les opposants à la force d’occupation nazie, considérés comme un danger pour la sécurité de l’armée allemande et comme des ennemis du Reich : saboteurs, communistes, responsables de réseaux, agents parachutés, comme toutes les personnes soupçonnée d’entretenir des contacts « avec l’ennemi » peuvent arrêtées par l’armée. S’ils ne peuvent pas être traduits devant un tribunal militaire allemand, et jugés dans un délai de huit jours, la peine de mort devant être prononcée, ils doivent être transférés en Allemagne pour y subir leur jugement et disparaître sans laisser de traces, « dans la nuit et le brouillard ». À partir de 1943, malgré les protestations de la Wehrmacht qui tenait à conserver l’exclusivité de sa procédure, la Gestapo mettait en place sa propre procédure N.N., hors toute implication judiciaire : les détenus N.N, selon la procédure de la Gestapo, étaient arbitraire­ment affectés à certains K.L., comme Natzweiler, avec interdiction de sortir du camp pour travailler dans un Kommando à l’extérieur ou d’être affectés à un autre K.L. Le 30 juillet 1944, compte tenu de la débâcle allemande, et pour ne laisser aucune trace de ce processus d’extermination, un nouveau décret promulgué par Keitel, dit « Terreur et Sabotage » a pour effet d’abolir la procédure « Nuit et brouillard ». Tous les détenus et les déportés N.N sont remis à la Gestapo, qu’ils soient ou non jugés, et intégrés au système concentrationnaire, la consigne implicite étant de supprimer physiquement les déportés N.N.
  • O.K.W.
    Oberkommando der Wehrmacht, commandement suprême des forces armées allemandes, dirigé par Keitel, et à la tête des trois composantes des Oberkommando particuliers : O.K.H. pour l’armée de terre, O.K.M. pour la marine, O.K.L. pour la Luftwaffe.
  • Reichskanzler
    Chancelier du Reich, titre porté par le chef de gouvernement. L’administration qui entoure le chancelier est la chancellerie, Kanzlei. Hitler avait à sa disposition trois chancelleries, celle du Reich, dirigée par Lammers, celle du parti nazi, dirigée par Bormann et sa chancellerie personnelle, dirigée par Bouhler.
  • R.S.H.A.
    Reichssicherheitshauptamt : Office central de la sûreté du Reich. Organisme créé en 1939 pour coor­donner d’une part l’action des deux principales polices d’état que sont la Gestapo et la Kripo, formant la SIPO. Et d’autre part, les deux branches du S.D. que sont le S.S. Sicherheitsdienst – service de sûreté de la S.S., et le service de renseignement privé de la S.S., avec, pour l’intérieur du pays, le S.D. Inland, et pour l’étranger, le S.D. Ausland. Le chef du R.S.H.A. fut le S.S. Heydrich, puis, après 1943, le S.S. Kaltenbrünner. La Gestapo, dont le chef était Heinrich Müller, devint l’Amt IV, office IV du R.S.H.A. ; la Kripo, l’Amt V, le S.D. intérieur, l’Amt III et le S.S. étranger, l’Amt VI. Le R.S.H.A. fut donc un orga­nisme administratif mixte, commun aux deux services de l’État, ceux constituant la Sipo, à savoir la Kripo et la Gestapo, et à deux services de la S.S., ceux constituant le S.D. D’où de nombreuses confusions entre les services, auxquelles les Allemands eux-mêmes n’échappaient pas.
  • SchutzStaffel
    Service de protection paramilitaire dirigé par Himmler.
  • S.S.
    Schutzstaffel der N.S.D.A.P : Troupes de Protection du Parti National-Socialiste. À l’origine, simple service d’ordre du parti nazi créé par Himmler en 1923 : il avait 280 membres en 1929 et 50.000 à la veille de la prise du pouvoir en 1933. Après l’élimination des S.A. – sections d’assaut dirigées par Roehm, le 30 juin 1934, lors de la Nuit des longs couteaux ; Himmler et les S.S. prirent possession de toutes les polices et de la direction des camps de concentration. En 1936, la S.S. comptait 210.000 hommes. Après le déclenchement de la guerre fut créée la Waffen S.S. qui compta jusqu’à 40 divisions.
  • Waffen S.S.
    Groupes d’unités combattantes – dont la légion Charlemagne – formées de volontaires allemands et étrangers appartenant à la SchutzStaffel (S.S.).
  • Wehrmacht
    Ensemble des forces armées de l’État, à l’exclusion de la Waffen S.S.
Sur le vocabulaire spécifique aux camps de concentration :
  • Aufseherin
    Surveillante S.S.
  • Block
    Baraque des détenus. Dans la plupart des camps, chaque baraquement mesurait environ 50mX7 m, et était partagé en deux parties, l’une constituant le dortoir, l’autre pièce commune comprenant un poste d’eau et des W.C.
  • Blockältester
    Doyen du block, détenu responsable du block et de son effectif.
  • Blokova
    Argot tchèque universellement utilisé pour désigner la même fonction.
  • Le bunker
    prison du camp avec ses cachots et chambres de tortures.
  • Cartes roses
    Carte-dispense de travail pour les personnes âgées. Il s’avéra, vers la fin de 1944, que ces cartes roses représentaient le premier tri qui devait mener à la sélec­tion puis à l’assassinat des femmes « inaptes au travail ».
  • D.W.B - Deutsche Witrtschaftsbetriebe
    Les entreprises écono­miques allemandes : Holding coiffant l’ensemble des entreprises — plus d’une quarantaine — appartenant en sous-main à la S.S. Certaines étaient sans rapports directs avec le système concentrationnaire. En revanche, d’autres étaient destinées à exploiter, au profit de la S.S., la main d’oeuvre concentrationnaire : par exemple, la « Société Logements et Foyers », gérant la construction de villas pour les S.S. à Dachau ; la D.A.W, fabrique d’armes et d’équipements, présente à Auschwitz, Buchenwald, Dachau, Sachsenhausen, Neuengamme, Ravensbrück, Stutthof… ; la Texled, Textiles et Cuir, présente à Ravensbrück ; « Les Ma­tières Premières de l’Est » présente à Auschwitz ; et sur­tout, la D.E.S.T, Deutsche Erd und Steinwerke : exploi­tation de la pierre et des argiles, pour les besoins de laquelle le site de nombreux camps fut choisi, Flossenbürg, Mauthausen, Gross Rosen, Natzweiler, Auschwitz, Treblinka I, Buchenwald, Neuengamme, Stutthof… L’ensemble des entreprises de la S.S. fut dirigé par le service W du W.V.H.A.
  • I.K.L. - Inspektion der Konzentrationslager
    Inspection des camps de concentration. Organisme dont la S.S. et la Gestapa — organisme de gestion de la Gestapo — se sont disputé le contrôle, et dont le siège fut finalement implanté à Oranienburg. Cet organisme, dirigé d’abord par Theodor Eicke, fut intégré en 1942 au sein du W.V.H.A. de la S.S. dont il constitua l’Office D 1 sous la direction de Liebhenschel puis de Hoess. L’intégration de cet organisme au sein du W.V.H.A. marque sa prise de contrôle sans partage par la S.S. C’est à lui que furent confiées l’administration et la gestion des camps de concentration d’État. Mais l’affectation au travail des détenus dépendait d’un autre organisme S.S., l’Arbeits­einsatz, qui devint le service D2 du W.V.H.A. En inter­venant dans des camps qui n’étaient pas des K.L. officiels, l’I.K.L. s’efforça de les intégrer dans le réseau sur lequel elle avait la haute main.
  • Kapo
    Contraction de Kamaraden Politzei : détenu responsable d’un kommando de travail, choisi le plus souvent parmi les détenus de droit commun, et qui se comportait en auxiliaire zélé des S.S.
  • Poser
    punition qui consiste à laisser les détenus debout de 2 heures, 4, 6, voire 24 heures en guise de punition
  • Pouf
    Puff, allemand vulgaire : bordel. La direction des camps de concentration avait installé de petits bordels dans quelques grands camps d’hommes comme faveur pour les détenus fonctionnaires, les Prominente. Les filles de ces bordels étaient recrutées à Ravensbrück : on leur promettait la libération au bout de 6 mois. En fait, passé ce terme, elles étaient renvoyées à Ravensbrück, épuisées, malades et y mourraient le plus souvent.
  • Revier
    Infirmerie
  • Schmuckstück
    Détenue à l’état physique dégradé appelée par dérision « bijou » par les S.S. Dans les camps d’hommes, les S.S. les désignaient sous le terme de « musulmans ».
  • Straf-block
    Block disciplinaire d’où les colonnes de travail sortaient en chantant, sous la contrainte, des chants allemands.
  • Stubova
    Argot tchèque pour Stubendienst, chef de chambrée ; chaque block était séparé en deux immenses chambrées, surpeuplées, équipées de châlits sur trois étages.
  • Schnell, Los, Raus
    interjections allemandes : « Vite, Allez, Ouste, Sortez ! »
  • Transport
    Soit le transfert dans une usine de guerre lointaine ou sur un chantier, soit vers un lieu inconnu que l’on pressent être un lieu d’extermination. C’est le transport noir.
  • Les Triangles
    En tissu de couleur de 4 à 5 cm, ils étaient cousus sur la tenue rayée, pointe en bas. La couleur représentait la catégorie à laquelle le déporté appartenait, ceci dans tous les camps de concentration. Le « triangle vert » était un détenu de droit com­mun dite Kriminel. Un « triangle noir » était un détenu interné pour atteinte à la qualité de la race, dite asociale : marginal, ivrogne, prostituée, mauvaise mère etc. Les « triangles violets » étaient les témoins de Jéhovah, dites Bibelforscherin et les « triangles rouges » les politiques.
  • W.V.H.A der S.S. Wirtschafts – und Verwaltungshauptamt
    Office central d’administration économique de la S.S. Service créé en 1942 qui, entre autres activités, intégrant en son sein l’I.K.L. (Amt D1) et Arbeitseinsatz (Amt D2), gérait et exploitait économiquement les camps de concentration d’État. Par ailleurs, il gérait les troupes de la S.S. armée et assurait la direction des entreprises appartenant à la S.S.. Cet organisme, dirigé par le S.S. Oswald Pohl, s’installa à Oranienburg.
  • Zebra
    L’uniforme rayé de bandes bleues et blanc grisâtre verticalement disposées ne fut généralisé qu’à partir de 1938. Les détenus allemands lui donnèrent le nom de Zebra, zèbres et parfois se désignèrent eux-mêmes comme des Zebra. À l’origine des camps sauvages, les détenus portaient les habits avec lesquels ils avaient été appréhendés, puis ils reçurent des uniformes réformés de la police ou des habits blanchâtres qui avaient été en usage dans l’armée allemande afin d’économiser les équipe­ments réglementaires. Sur les vestes étaient tracées, à la peinture à l’huile, deux traits rouges disposés en X destinés à attirer le regard, en cas d’évasion. À partir de l’été 1944, pour cause de pénurie, des tenues furent prélevées sur des vêtements des arrivants, dans lesquels on avait découpé dans le dos une grande croix « X » et recousu à la place un autre « X » taillé dans un autre tissu.
  • Zählappel
    L’appel général pour compter les détenus (zählen) avait lieu à 4 heures devant chaque block sur dix rangs, les petits devant les grands derrière.

Résistances

-Morbihan