COLLABORATION, RÉPRESSION,
DÉPORTATION VERS DES PRISONS DU REICH
ET LES CAMPS D’HINZERT ET DE NATZWEILLER
Après la signature de l’armistice, à Rethondes, le 22 juin 1940, pour paraître ménager la France militairement vaincue, aucune partie du territoire français occupé, à l’exception des trois départements de la Moselle, du Bas Rhin, et du Haut Rhin, et de ceux du Nord et du Pas de Calais, n’ était administrée directement par une autorité allemande, comme l’était la Pologne ou, comme le seraient, plus tard, les régions occupées de L’URSS. Toutefois, selon l’article 3 de la convention d’armistice, la police française, comme tous les services de l’Etat, était tenue d’exécuter les ordres allemands. De plus, selon l’ article 19, le gouvernement français s’engageait à livrer les ressortissants allemands que l’occupant pourrait réclamer (1).
Quelques dates repères concernant la terreur répressive exercée par l’occupant avec la complicité des forces de police de l’Etat français:
De juin 1940 à juin 1942, les pouvoirs de répression appartenaient quasi exclusivement au Commandement militaire allemand en France qui les exerçait par ses services de police, la Feldgendarmerie et la Geheime Feldpolizei, et de contre-espionnage, l’Abwehr. Toute forme de résistance, même individuelle, était illégale et pour prévenir les actes contre les personnels et le sabotage des matériels ou des installations, les autorités entendaient également intimider la population et la décourager de commettre, de soutenir ou même de tolérer de telles actions, d’où les prises d’otages. Parallèlement, la lutte contre les premiers réseaux gaullistes s’organisait et, à partir de l’entrée en guerre contre l’URSS, en juin 1941, celle contre «le complot judéo-bolchevique » s’accentuait, marquée par une série d’arrestations menées en liaison avec la police et la gendarmerie françaises .
Le discours prononcé à la radio par Pétain, le 12 août 1941, éclaire parfaitement la portée de cette collaboration:
Français, j’ai des choses graves à vous dire.
De plusieurs régions de France, je sens se lever depuis quelques semaines, un vent mauvais. … [Le trouble des esprits] provient, surtout, de notre lenteur à construire un ordre nouveau, ou plus exactement à l’imposer. Un long délai sera nécessaire pour vaincre la résistance de tous les adversaires de l’ordre, mais il nous faut, dès à présent, briser leurs entreprises, en décimant les chefs.(2)
ce d’autant plus, qu’ après l’été, des services spécialisés étaient constitués au sein de la police nationale: le service de police anticommuniste ou SPAC, la police aux questions juives ou PQJ et le service des sociétés secrètes.
Après le premier attentat commis contre un membre de la Wehrmacht, le 21 août 1941, la répression s’aggravait : toutes les personnes arrêtées devenaient otages et étaient susceptibles d’être passées par les armes selon la gravité de l’attentat commis.
Le 21 août 1941, Pierre Georges, le futur colonel Fabien, tuait l’aspirant de marine allemand Moser au métro Barbès, à Paris. Aussitôt, l’administration militaire allemande annonçait que les Français détenus pour le compte des Allemands étaient considérés comme des otages, susceptibles donc d’être fusillés. Le gouvernement de Vichy s’associait à ces représailles. Le 22 août 1941: le gouvernement de Vichy créait une juridiction spéciale pour juger les «menées antinationales», en particulier l’activité «communiste et anarchiste». Essentiellement dirigée contre les communistes, cette loi était antidatée au 14 août pour permettre à ces sections spéciales de disposer d’une compétence rétroactive. Une « Section spéciale » de la Cour d’appel de Paris condamnait ainsi à mort, dès le 27 août 1941, Emile Bastard, André Bréchet et Abraham Trzebucki, qui étaient guillotinés le 28 août. Le 24 septembre 1941, Jean Catelas, député d’Amiens, Adolphe Guyot et Jacques Woog, subissaient le même sort.
Toutefois, Hitler jugeait ces mesures trop clémentes. Un premier décret signé le 16 septembre 1941, par Keitel ordonnait l’exécution de 50 à 100 communistes pour la mort d’un soldat allemand, et demandait aux tribunaux militaires de condamner à la peine capitale les auteurs d’action de résistance.
Le 20 octobre 1941 au matin à Nantes, le lieutenant-colonel Hotz, le Feldkommandant, était abattu. Le lendemain, c’était au tour d’un conseiller d’administration militaire, Hans Reimers, d’être tué à Bordeaux. Pour le premier mort, les autorités allemandes procédaient le 22 octobre à l’exécution de 48 otages, essentiellement issus du camp de Châteaubriant ; pour le second, ils fusillaient deux jours plus tard 50 autres otages à Souges, près de Bordeaux. Fin novembre 1941, trois soldats allemands étaient tués et cinq autres blessés dans l’explosion d’un bar parisien. Deux jours plus tard, un soldat était abattu dans les rues de Brest. Le 15 décembre 1941 : 95 otages, en grande majorité communistes, étaient fusillés selon les représailles prévues ; plus de 50 étaient des Juifs provenant du camp de Drancy.
Le 7 décembre 1941 : à la demande d’ Hitler, Keitel faisait promulguer le décret Nacht und Nebel, dit Nuit et Brouillard suite logique de son précédent texte du 16 septembre. Ainsi étaient créées une juridiction et une procédure spéciales comportant un jugement et l’exécution des peines, en Allemagne, dans le plus grand secret. Les condamnés disparaissaient dans «la nuit et le brouillard », ce qui était censé provoquer un effet dissuasif sur le reste de la population.
Rappelons que les articles 1 et 2 du premier décret Keitel de septembre 1941, déterminaient que:
« la peine de mort est de rigueur pour tous les actes délictueux commis par des civils non allemands, dirigés contre le Reich ou contre la puissance occupante » , lesdits actes n’étant à condamner « dans les territoires occupés que s’il apparaît probable que des condamnations à mort seront prononcées contre leurs auteurs. Dans les autres cas, les coupables seront transférés en Allemagne »
Des ordonnances d’application en date du 12 décembre 1941, précisaient les motifs d’arrestation à savoir : attentats à la vie, espionnage, sabotage, menées communistes, aide à l’ennemi, détention illégale d’armes, et formulaient l’objectif recherché par cette procédure:
« un effet de frayeur efficace et durable ne peut être atteint que par la peine de mort ou par des mesures propres à maintenir les proches et la population dans l’incertitude sur le sort des coupables. Le transport en Allemagne permet d’atteindre ce but. »
Enfin, une ordonnance de Keitel en date du 16 avril 1942, clarifiait le contenu du secret entourant la procédure NN :
« Les coupables transportés en Allemagne ne sont autorisés à aucun contact avec le monde extérieur: aussi n’ont-ils droit ni d’écrire ni de recevoir lettres, colis, visites. Ceux-ci sont à renvoyer avec la mention que tout contact avec le monde extérieur est interdit au coupable. »
Le décret NN marquait, de fait, un tournant dans la politique de répression qui, sans interrompre totalement les condamnations à mort et les exécutions en France, rendait quasi systématique la «déportation vers l’Est». Par exemple, si en septembre 1942, plusieurs opérations de fusillades furent encore effectuées au Mont-Valérien et à Souges, au cours desquelles 116 otages furent massacrés, une nouvelle fusillade de 114 otages envisagée pour le 15 octobre, était finalement suspendue. En Bretagne, après les exécutions à la Maltière du 30 décembre 1942, l’année 1943 ne connaîtrait aucune exécution d’otages ni dans ce camp ni dans celui du Polygone, à Vannes.
Par ailleurs, à partir de mai 1942, suite à la nomination du général SS Karl Oberg, comme commandant supérieur SS de la police en France occupée, la répression de la Résistance passait des mains des militaires allemands à celles de la police politique. Karl Oberg lui -même constatait l’échec de l’exécution d’otages comme moyen d’intimidation des combattants de la liberté, lorsqu’il écrivait en novembre 1942
« Les attentats de ces derniers mois ont pu être à 90 % élucidés et les coupables arrêtés. Compte tenu de ce qui précède, on n’a pas jugé opportun, jusqu’ici, d’en venir à fusiller des otages aussitôt après un attentat, le ressentiment existant dans une grande partie de la population à l’encontre de l’Allemagne, alors même que, dans le choix des otages, on s’était limité aux terroristes, aux communistes et aux juifs. » (2)
Aussi était mise en place une organisation répressive qui s’étendait aux onze «préfectures » régionales, avec des antennes dans tous les départements où étaient représentés les services de police allemands: la Gestapo, Geheime Staatspolizei, la Sipo, Sicherheitspolizei, et le SD, Siche-rheitsdienst (3). Les mêmes dispositions étaient adoptées, après novembre 1942, dans l’ancienne zone libre. En mars 43, le Sipo-SD comptait en France dix-sept postes régionaux, et soixante-deux postes locaux, dans la plupart des préfectures ainsi que quinze postes contrôlant la frontière des Pyrénées.
La coopération avec Vichy était institutionnalisée et, sur l’intervention de Heydrich lui-même, se concrétisait par les deux accords Oberg-Bousquet de juillet 1942 et avril 1943 par lesquels le gouvernement de Vichy entendait associer ses services de police et de gendarmerie à la chasse aux résistants, aux réfractaires au Service du Travail Obligatoire et aux Juifs. Voici comment, lors de son procès, Karl Oberg disait l’avantage de cette collaboration pour les forces d’occupation: « Nous avions intérêt à ce que la police française soit réunie dans une seule main. Conformément à l’accord que j’avais établi avec Bousquet, la police française agissait de façon indépendante dans une ligne de conduite commune avec la police allemande et sous la responsabilité de Bousquet ; ceci était aussi valable pour les actions concernant la question juive.» (2)
De plus la création d’unités, comme les Brigades Spéciales et les Groupes Mobiles de Réserve, augmentait les capacités des groupes d’action des SS, en particulier contre les maquis. Enfin la nomination en janvier 1944, de Joseph Darnand, chef de la Milice depuis 1943, comme secrétaire général au maintien de l’ordre, allait renforcer la collaboration répressive contre les résistants. On peut estimer que, courant 1944, 12 000 SS et 13 000 miliciens appuyés par quelques 25 000 membres des GMR et 6 000 gendarmes mobiles étaient associés dans la chasse aux résistants.
Après leur arrestation, les résistants étaient détenus au siège de l’autorité qui les avait appréhendés, SD, Feldgendarmerie, Abwehr, mais également polices françaises, gendarmerie et même Milice. Puis, selon la durée de l’enquête les concernant, ils étaient incarcérés dans des prisons, généralement des « quartiers allemands » de prisons françaises. Enfin, après un délai variable, de quelques jours à plusieurs semaines voire plusieurs mois, ils étaient généralement transférés, soit dans les prisons parisiennes avant un départ vers les prisons allemandes, soit aux camps de transit de Compiègne-Royallieu et Romainville, avant un départ vers l’un des neufs grands camps de concentration du Ille Reich.
De 1940 aux derniers mois de l’année 1944, les départs vers les prisons concerneraient 8 700 déportés. Quelques 550 déportés décédaient dans une prison du Reich, dont au moins 135 y furent exécutés.
De 1940 à 1942, les déportations vers les prisons du Reich étaient le plus souvent consécutives à une condamnation qui, quand elle arrivait à terme, entraînait la libération du déporté : 535 déportés furent ainsi libérés d’une prison, le plus grand nombre au cours de l’année en 1944, les gestionnaires du système carcéral paraissant ainsi respecter une certaine légalité. Parfois, la personne libérée était néanmoins contrainte au travail forcé en Allemagne, ou considérée comme trop dangereuse, remise à la Gestapo qui l’ envoyait en camp de concentration pour une durée indéterminée. Au moins 6 % des personnes déportées pour exécuter leur peine en Allemagne auraient subi un tel transfert, c’est à dire une déportation dite de sécurité « Schutzhaft ».
A partir janvier 1942, la mise en oeuvre de la procédure NN donnait aux polices allemandes Sipo et Gestapo et aux services de sécurité de la S.S le S.D, le pouvoir d’interner et de déporter des suspects en dehors de toute procédure judiciaire, avec, de surcroît, la garantie du secret. Au moins 1300 déportés sous le statut NN Nacht und Nebel, défini par les décrets Keitel, partirent de France vers des prisons du Reich, ou vers les camps d’Hinzert et de Natzweiler-Struthof. De fait, peu de déportés NN seraient jugés par le Tribunal spécial de Cologne ou celui de Breslau d’autant que le décret « Terreur et Sabotage » signé par Hitler, fin juillet 1944, mettait fin à la procédure NN, et imposait la remise à la Gestapo des personnes commettant des actes de résistance contre l’occupant. Tous les déportés NN étaient alors intégrés au système concentrationnaire.
A notre connaissance, 134 personnes originaires du Morbihan ont été déportées vers des prisons du Reich ou dans les camps d’Hinzert et de Natzweiler, entre le 7 juillet 1941 et le 27 août 1944, au moins 52 d’entre elles allaient mourir ou disparaître dans une prison ou un camp nazis.
Transports partis de la Gare de l’Est à Paris ou de prisons françaises entre août 1940 et novembre 1941 vers diverses prisons du Reich avant l’application de la procédure NN
Dès le début de l’occupation en août 1940, les services dépendant du Commandement militaire allemand de Paris procédaient à la déportation, vers des prisons du Reich, des personnes condamnées par les Tribunaux militaires allemands siégeant en zone occupée, ce pour tout acte considéré comme une opposition à l’occupation nazie quand les peines prononcées étaient supérieures à six mois d’emprisonnement. Lesdits actes étaient alors, le plus souvent, le fait d’individus isolés, par exemple avoir apporté de l’aide à des soldats anglais ou français en fuite, s’être battu avec des soldats allemands, avoir détenu des armes, même de chasse. Ceci explique les modalités des transports vers l’Allemagne, par petits groupes de condamnés, soit dans un train de soldats allemands permissionnaires retournant en Allemagne, soit dans un train ordinaire de voyageurs.
Deux jeunes bretons furent ainsi arrêtés à Brest dès le 19 juin 1940 pour avoir fait prisonniers trois aviateurs allemands tombés en Bretagne en mai 1940: condamnés par le tribunal militaire de Brest, l’un, Jean-Marie Kerandel était fusillé le 28 juin 1940, le second, Jean Balcon, né le 23 mai 1905 à Plouguermeau (29) était déporté le 4 septembre 1940 et incarcéré dans la prison d’exécution des peines de travaux forcés, à Siegburg, ville proche de Bonn, puis transféré à celle de Hameln, proche de Hanovre, où il était libéré le 7 avril 1945.
Dans la nuit du 12 février 1941, 15 jeunes gens affiliés au réseau Hector *, tentaient de rejoindre l’Angleterre en bateau à partir de Saint Cast, mais se faisaient intercepter par un patrouilleur allemand à 50 kilomètres de Guernesey. Arrêtés, ils comparaissaient le 20 mars 1941 devant le Tribunal militaire allemand de Saint Lô pour tentative de rejoindre une nation en guerre contre l’Allemagne. Deux d’entre eux, Pierre Devouassoud et Magloire Dorange, étaient condamnés à mort, comme instigateurs, et fusillés le 12 avril 1941. Maurice Queret, mineur âgé de 17 ans, était condamné à sept ans de prison, les 12 autres aux travaux forcés à perpétuité. Tous les 13 étaient déportés le 28 avril 1941 et incarcérés dans la prison de Luttringhausen, près de Düsseldorf dans laquelle décédaient, le 17 août 1944, Raymond Canvel, né le 29 octobre 1921 à Ergué-Armel ( 29): il avait 22ans, le 19 septembre 1944, Auguste Zalewski, né le 29 juin 1921 à Quiberon : il avait 23ans.
Le 7 juillet 1941, était déporté Louis Croizer, né le 21 octobre 1921 à St Mathurin par Ploemeur, membre du groupe de résistance « Le Coq Gaulois »*, condamné le 22 mai 1941 pour aide à l’ennemi. Louis était incarcéré tout d’abord dans la prison de Karlsruhe, puis transféré dans celle de Rheinbach, près de Bonn, prison prévue pour l’exécution des peines de travaux forcées, enfin dans celle de Siegburg où il était libéré le 18 mai 1945.
Le 24 juillet 1941, était déporté Jean Blevec , né le 9 avril 1922 à Lorient. Jean était incarcéré tout d’abord dans la prison de Karlsruhe puis transféré dans celles de Rheinbach, de Siegburg, et enfin de Waldheim, prisons prévues pour l’exécution des peines de travaux forcés. Nous ignorons s’il est revenu de déportation. Faisait aussi partie de ce transport, Georges Lépinard, né le 29 septembre 1914 à Vannes: le 8 mars 1941, après le couvre feu, ce dernier avait été arrêté pour avoir frappé un des feldgendarmes qui l’interpellaient, sa condamnation à mort était commuée en une peine de travaux forcés de 5ans, puis il bénéficiait d’une remise de peine qui, après un parcours carcéral analogue à celui de Jean Blevec, entraînait sa libération, de la prison de Karlsruhe, le 23 décembre 1943.
Le 4 août 1941, étaient déportés les six patriotes suivants, arrêtés à Josselin, Ploërmel, et à Pontivy, cinq d’entre eux, le 4 mai 1941, Paulette Caro, couturière, née le 25 janvier 1920 à Lanoué, Marie Chérel, employée, née le 29 avril 1915 à Ploërmel, Paulette Collet, comptable, née le 29 juillet 1922 à Paris, Raymond Hardy, né le 10 septembre 1913 à Truguel, et Louis Rouillard, né le 18 septembre 1921 à Pontivy, le sixième, le 12 mai 1941, Joseph Guihard, photographe, né le 28 janvier 1888 à Bourges. Ce dernier avait reproduit une photographie du Général de Gaulle que les cinq autres personnes avaient diffusée. Les trois hommes furent condamnés à 9 mois d’emprisonnement en Allemagne, Marie Chérel et Paulette Caro à six mois, Paulette Collet à un an. Tous étaient d’abord incarcérés dans la prison de Karlsruhe, puis les trois hommes étaient transférés dans celle de Sarrebruck et libérés à la fin de leur peine, le 15 mars 1942, les trois femmes étaient transférées dans la prison de Cologne, Paulette Caro et Maire Chérel étant libérées le 6 décembre 1941, en revanche le sort fait à Paulette Collet n’est pas connu.
Transports partis de la Gare de l’Est à Paris ou de diverses prisons françaises entre décembre 1941 et décembre 1942 emportant vers une prison du Reich des prisonniers originaires du Morbihan relevant de la procédure NN
En décembre 1941, suite à l’opération Porto menée par l’Abwer, service de contre espionnage de l’armée allemande ayant infiltré des agents doubles dans des réseaux (3) de résistants, en particulier Hector et Saint -Jacques, et procédé à des centaines d’arrestations, 212 hommes et 19 femmes étaient déportés notamment vers les prisons de Düsseldorf, la Gestapo de cette ville étant chargée de l’instruction des dossiers de l’opération Porto. Si ces déportés ne sont pas envoyés en Allemagne en application directe de la procédure « Nacht und Nebel » en cours d’élaboration, ceux d’entre eux qui n’étaient pas condamnés à mort, comme le furent au moins 33 hommes, exécutés, le plus souvent à Cologne, dans la prison de Klingelpütz, étaient pour la plupart classés NN une fois incarcérés en Allemagne.
Parmi les condamnés à mort se trouvaient Jules Frémont, né le 19 juillet 1891 à Broualan (35), René Gallais, né le 16 mars 1892 à Pleugeneux (35), Jules Rochelle, né le 24 mai 1898 à Fougères (35). Ces trois résistants furent exécutés le 21 septembre 1943 dans la prison de Munich: ils avaient 52 ans, 51 ans et 45 ans. Quelques soixante personnes furent libérées à l’issue de l’instruction, après leur transfert au camp de Hinzert, faute de pouvoir être impliquées dans un des réseaux. Tel fut le cas de René Decker, né le 18 septembre 1889 à Vannes, libéré le 15 août 1942.
A partir d’avril 1942, avec la nomination de Karl Oberg, la police allemande obtenait le contrôle de la répression en zone occupée, ce qui entraînait des changements importants dans l’organisation de la déportation au départ de France, avec la constitution de transports comprenant plusieurs centaines de personnes souvent non-jugées et déportées directement de Compiègne vers un camp de concentration. De plus, à partir de mai 1942, la majorité des hommes arrêtés dans le cadre de la procédure «NN » n’étaient plus déportés vers des prisons mais vers le SL Hinzert. La déportation vers des prisons du Reich n’était donc plus, à partir de cette date, quantitativement la plus importante. Néanmoins, même si l’armée était dessaisie d’une grande partie de la répression, en particulier contre les actions de résistance, l’activité des tribunaux militaires se poursuivait pour le maintien de l’ordre courant, c’est-à-dire les actes relevant du droit commun, mais aussi les nombreux actes isolés d’opposition à la présence allemande dite «résistance civile».
Si bien que la part la plus importante parmi les déportés partis vers des prisons du Reich restait composée des personnes condamnées par un tribunal militaire allemand d’occupation institué auprès des Feldkommandantur, dans chaque département occupé. Les condamnations qu’elles prononçaient pouvaient, sur décision du Commandement militaire de Paris, conduire à la déportation vers des prisons du Reich. Dans le cas des départs de Paris, la première destination rencontrée était la prison de Karlsruhe. Ainsi, de façon hebdomadaire et souvent le lundi, de petits groupes d’hommes et de femmes, condamnés par un tribunal et rassemblés dans les prisons de Fresnes, du Cherche-Midi ou de La Santé, étaient conduits à la gare de l’Est et embarqués dans un train de voyageurs sous la garde de Feldgendarmes. Le plus souvent partis dans la soirée, ils arrivaient le lendemain matin à Karlsruhe, prison qui constituait un lieu de transit et de triage avant une nouvelle destination dictée par l’âge, le sexe du détenu et la nature de la peine exécuter. Souvent les hommes étaient envoyés à Rheinbach ou vers les prisons de Francfort-sur-le-Main, de Sarrebruck ; les femmes vers les prisons d’ Aix La Chapelle, d’Anrath, et de Fribourg-en-Brisgau.
Ainsi, en avril 1942, 31 hommes et 23 femmes, le plus souvent déjà condamnés par des Tribunaux militaires allemands siégeant en France, étaient déportés notamment vers les prisons de Karlsruhe et d’Aix La Chapelle. La moitié d’entre eux relevait de la procédure NN. Ce n’était pas le cas de François Allano, né le 23 janvier 1907 à Vannes et de Joseph Séveno , né le 4 août 1914 à Séné. Tous les deux avaient été arrêtés pour détention d’un fusil de chasse et condamnés à 5 ans de travaux forcés. Déportés le 6 avril 1942, et d’abord incarcérés dans la prison de Karlsruhe, ils étaient transférés dans celles de Sarrebruck, de Rheinbach, enfin dans celle de Siegburg. Si Joseph Séveno y était libéré le 10 avril 1945, nous ignorons en revanche si François Allano est revenu de déportation, ce qui est aussi le cas pour Gustave Maltner, né le 16 février 1912 à Vannes, déporté le 7 septembre 1942.
En mai 1942, 44 hommes et 14 femmes, le plus souvent déjà condamnés par des Tribunaux militaires allemands siégeant en France, étaient déportés notamment vers les prisons de Karlsruhe et d’Aix La Chapelle. 20 d’entre eux relevaient de la procédure NN, trois seraient décapités le 21 août 1942 à Cologne dont Hippolyte Hardouin, né le 6 février 1898 à Revigny (35). Parmi les 16 autres résistants qui décèderaient dans une prison ou un camp nazis, se trouvait Jean du Plessis de Grénedan, né le 29 novembre 1890 né à Mayenne (53), demeurant à Ménéac dans le Morbihan, membre du réseau « Kléber » *, arrêté le 3 juillet 1941 à Morlaix , incarcéré à Brest et à Rennes puis transféré à la prison de Fresnes de la mi juillet 1941 au 25 mai 1942 date à laquelle il était déporté vers la prison de Karlsrule, puis transféré dans celles de Rheinbach et de Wittlich où il décédait le 20 mai 1943, il avait à 52 ans.
En août 1942, 192 hommes et 21 femmes, le plus souvent déjà condamnés par des Tribunaux militaires allemands siégeant en France étaient déportés notamment vers les prisons de Karlsruhe et de Landsberg, proche de Halle. Peu d’entre eux relevaient de la procédure NN. Parmi ces derniers se trouvaient Jean Henri, né le 1 avril 1902 à Lorient et François Querré, né le 11 février 1920 à Laroche en Santec (29). Ils décédaient dans la prison d’exécution des peines de travaux forcés de Sonnenburg, proche de Francfort sur Oder, le premier, le 15 août 1944: il avait 42 ans, le second, le 11 novembre 1944: il avait 24 ans.
En septembre 1942, 116 hommes et 36 femmes, le plus souvent déjà condamnés par des Tribunaux militaires allemands siégeant en France étaient déportés notamment vers les prisons d’Aix La Chapelle, pour les femmes, de Karlsruhe pour les hommes. Peu d’entre eux relevaient de la procédure NN. Parmi ces derniers se trouvaient Marcel Gerbohay, né le 3 mai 1917 à Pacé (35), décapité le 9 avril 1943 dans la prison de Berlin: il avait 25 ans et Marie Nancel , née le 28 mai 1911 à Ergué-Gaberie (29), décédée le 15 novembre 1944 dans la prison d’exécution des peines de travaux forcés pour femmes de Jauer, proche de Breslau: elle avait 33 ans.
En revanche, déportés courant 1942, étaient libérés des prisons allemandes: Jules Bissonet, né le 4 mars 1901 à Ploemeur, il avait été arrêté le 14 août 1942, à Keryado, pour détention d’un fusil de chasse et condamné à trois ans de travaux forcés, qu’il effectuait dans les prisons de Karlsruhe, de Rheinbach, enfin dans celle de Diez Lanh, près de Coblence, où il était libéré, le 8 avril 1944; Aimé Clément, né le 22 mai 1898 à Belle-Ile en Mer, libéré de la prison de Landsberg, près de Halle, le 27 avril 1945, comme Marcel Moisiard, né le 14 juillet1902 à Mohon et Louis Lesquéré, né le 8 décembre 1890 à Guidel; Albert Jehanno, né le 15 décembre 1923 à Réguiny, ainsi que son ami, André Olivier, né le 17 avril 1922 à Guegon. Les deux jeunes hommes avaient quitté Réguiny, le 25 mars 1941, dans l’espoir de rejoindre l’Angleterre en passant par l’Espagne. S’ils parvenaient à passer la frontière le 28 mars, ils étaient interpellés peu après par un carabinier espagnol qui les remettait à deux feldgendarmes. Condamnés à mort le 16 avril 1941, ils voyaient leur peine commuée, Albert, à 8 ans de prison, André plus âgé, à 10 ans et étaient déportés, le premier en août 1942, dans la prison de Fribourg, puis dans celle de Wolfenbüttel, située dans le Nord de l’Allemagne, où il était libéré le 11 avril 1945, le second, en septembre 1942, dans la prison, de Karlsruhe, puis transféré dans celles de Rheinbach, de Siegburg, enfin dans celle de Straubing, en Bavière, où il était libéré le 20 avril 1945; Jean Meudec, né le 21 janvier 1915 à Questembert, libéré du camp disciplinaire de Rollwald, le 26 avril 1945.
Transports NN partis de la Gare de l’est à Paris ou de diverses prisons françaises , entre le 22 mai 1942 et le 10 septembre 1943, vers le Sonderlager d’Hinzert pour les hommes ou vers la prison d’ Aix La Chapelle pour les femmes
Du 22 mai 1942 au 9 septembre 1943, trente sept transports « Nacht und Nebel » emportaient 1 446 hommes et quelques femmes par groupe d’une cinquantaine de personnes. Les femmes étaient dirigées vers la prison d’Aix La Chapelle, les hommes vers le camp spécial de la SS à Hinzert situé à la frontière germano-luxembourgeoise.
Ce camp avait été spécialement créé près de Cologne pour regrouper les prisonniers hommes venant de Paris devant être jugés en Allemagne. Les forces d’occupation cherchaient, par cet internement de « transit », à pallier l’encombrement des prisons parisiennes comme de celles proches des Tribunaux allemands. Au départ, à la gare de l’Est, les détenus étaient enfermés dans des wagons de troisième classe, dont les compartiments étaient aménagés en cellules aux fenêtres grillagées. Les femmes étaient séparées des hommes dans la gare de Trèves. Après un bref séjour dans la prison de cette ville, elles étaient acheminées par voie ferrée vers la prison d’ Aix-la-Chapelle dans l’attente de leur jugement par le Tribunal de Cologne ou celui de Breslaü. Les peines prononcées, le plus souvent des travaux forcés, étaient exécutées dans les prisons «spécialisées », notamment celles de Lübeck , de Jauer ou de Sonnenbürg près de Francfort sur Oder. Quant aux hommes détenus, après être restés quatre à cinq mois dans ce camp, ils étaient transférés vers des prisons de détention préventive comme Brieg près de Breslau, Diez sur Lahn près de Coblence ou Wittlich près de Cologne, dans l’attente de leur jugement. Les motifs d’arrestation, les plus fréquents étaient la détention d’armes, la tentative de franchir la frontière espagnole ou la frontière franco-suisse, les activités communistes, l’appartenance au Front National ou à un réseau de Résistance.
Après le 37 ème transport arrivé le 10 septembre 1943 à Hinzert, le regroupement des détenus NN se faisait au KL Natweiller.
Nous mentionnons ci-dessous les transports dans lesquels étaient emmenés des condamnés ou prévenus originaires du Morbihan, et, le cas échéant, de Bretagne. Précisons que les matricules de plusieurs de ces déportés n’ont pas été retrouvés. Au moins 12 hommes, originaires du Morbihan, déportés à Hinzert allaient mourir ou disparaître dans les camps nazis
Parmi les déportés morts à Hinzert ou dans une prison du Reich se trouvaient:
déportés le 4 juin 1942: François Leon, né le 18 mars 1901 à Plougarneau (29), décapité le 15 septembre 1943 dans la prison de Klingelpütz à Cologne: il avait 42 ans; Marcel Roudot, né le 27 juin 1923 à Brest ( 29), décédé le 18 mai 1944 dans le pénitencier de Sonnenburg, il avait 20 ans.
déporté le 12 juin 1942 : Louis Lomenech, né le 23 août 1885 à Guidel , matricule 4375, décédé le 05 juillet 1942 à l’hôpital d’ Hermeskell: il avait 57 ans.
déporté le 9 octobre 1942: Marcel Lepape, né le 18 mars 1901 à Plougarneau (29), décapité le 15 septembre 1943 dans la prison de Klingelpütz à Cologne: il avait 42 ans.
déporté le 5 novembre 1942: Eugène Caro, né le 15 novembre 1921 à Ploërmel, matricule 5559, incarcéré à Wittlich puis à Breslau et enfin à Brieg où il décédait le 31 janvier 1945: il avait 23 ans. Eugène avait été arrêté, avec ses camarades Michel Bompay et Maurice Davalo, suite à une rixe avec des soldats allemands. Ces derniers reviendraient, eux, de déportation.
déporté le 12 février 1943: Joseph Pépion, né le 10 juillet 1882 à Néant sur Yvel , matricule 6163, cultivateur, arrêté à Mauron le 15 décembre 1942, suite à une dénonciation, pour détention d’un fusil de chasse, il décédait le 23 mars 1943 à Hinzert, il avait 60 ans.
date de déportation ignorée : Aimé Colin, né le 10 mai 1906 à Ploemeur, transféré dans la prison de Diez/Lahn où il décédait le 22 mars 1943, il avait 37 ans; Joseph Le Boulch, né le 16 juillet 1895 à Inguiniel, il décédait à Hinzert le 26 février 1943, il avait 47 ans; Robert Martay, né le 18 février 1926 à Pontivy, incarcéré dans les prisons de Wittlich , puis de Breslau, dans l’attente du jugement, il était transféré dans celle de Bautzen, proche de Dresde, et enfin à Untermassfeld où étaient exécutées les peines de prison simples. Robert revenait en France le 2 avril 1945 mais décédait peu après son retour, il avait 19 ans; Jean Trégarot, né le 28 novembre 1921 à La Vraie -Croix, incarcéré à Wittlich, transféré dans la prison de Cologne, puis dans celle de Dusseldorf, centre d’exécution des peines, où il décédait le 19 novembre 1943, il avait 22 ans.
Parmi ceux morts dans un camp de concentration, après l’abandon de la procédure NN se trouvaient:
déportés le 4 juin 1942: Marie Lafaye, née le 26 juillet 1891 à Pleugeneuc (29) transférée à Ravensbrück où elle décédait à une date non connue; Pascal Lafaye, né le 21 juillet 1927 à Rennes(35), transféré au KL Dora puis à son Kommando annexe de Nordhausen, où il décédait le 8 avril 1945: il avait 17 ans. Sans doute Pascal faisait-il partie du groupe de 6 jeunes étudiants de l’École Pratique d’Industrie de Rennes, liés au FTPF dénoncés et arrêtés en février 1942; Robert Lafon, né le 10 janvier 1902 à Lorient était incarcéré dans les prisons de Breslau, et de Wittlich, près de Cologne, dans l’attente du jugement, transféré ensuite dans le KL Dora, puis le Kommando de Nordhausen où il décédait le 4 avril 1945, il avait 43 ans;
déportés le 22 octobre 1942: Joseph Le Bris, né le 24 juillet 1890 à Lorient, sécrétaire de police à Lorient, il avait prêté son revolver à un homme qui s’en était vanté, ce qui entraînait son arrestation et sa condamnation. Incarcéré à Sonnenburg, il était transféré au KL Sachenhausen, puis au KL Neuengamme où il décédait le 5 décembre 1944: il avait 52 ans; Yves Nicolas, né le12 février 1879 à Ménihy Tréguier (29), transféré au KL Buchenwald où il décédait le 18 février 1945: il avait 64 ans.
déportés le 18 mars 1943: Amandine Kerhervé, épouse Texier, née le 15 février 1906 à Elven, transférée dans les prisons de Magdebourg, de Breslau, puis au KL Ravensbrück et enfin à celui de Mauthausen, elle y décédait le 17 avril 1945: elle avait 39 ans. Son époux Pierre, né le 14 avril 1895 à Elven, arrêté avec elle, et déporté dans ce même convoi, aurait été conduit à la prison de Wittlich, puis transféré au camp disciplinaire de Rollwald d’où il aurait été libéré le 26 mars 1945. Selon certaines sources Pierre Texier serait décédé le 28 juin 1945 à Nieder Roden en Allemagne avant son rapatriement.
date de déportation ignorée : Laurent Le Blevec, né le 10 juin 1901 à Riantec, incarcéré à Wittlich, près de Cologne dans l’attente du jugement, il était transféré dans la prison de Wohlau en Pologne, puis dans le Kommando de Gross Rosen où sévissait une épidémie de typhus : il décédait le 19 janvier 1945, il avait 43 ans;
En revanche, revenaient de déportation:
transport du 4 juin 1942: Vincent Corlay, né le 24 juillet 1897 à Plouhinec, fut transféré au KL Sachsenhausen où il était libéré le 22 avril 1945; Lucien Pihery, né le 2 août 1896 à Monteneuf, fut transféré au camp d’ Untermassfeld où il était libéré le 07 mai 1945.
transport du 10 juillet 1942: Louis Ferchaud, né le 19 mai 1900 à Hennebont, matricule 4600, transféré dans les prisons de Wittlich, Wohlau, et enfin au KL Flossenbürg, il était libéré le 23 avril 1945.
transport du 9 octobre 1942: Edouard Le Baron, né le 18 mai 1882 à Cléguerec, incarcéré à Wittlich puis transféré au camp disciplinaire de Rollwald où il était libéré le 26 mars 1945.
transport du 5 novembre 1942: Michel Bompay, né le 4 juillet 1924 à Ploërmel , matricule 5556, arrêté suite à une rixe avec des soldats allemands, incarcéré à Wittlich puis à Breslau, il était transféré aux KL Gross Rosen, Dora et enfin à celui de Bergen Belsen où il était libéré comme son camarade Maurice Davalo, né le 15 avril 1920 à Ploërmel, matricule 5565, libéré, lui, à Flossenbürg, le 23 avril 1945.
transport du 25 février 1943: Eugène Delaporte, né le 16 septembre 1898 à Concoret , incarcéré à Wittlich puis à Breslau, fut transféré aux KL Sachsenhausen puis Buchenwald où il était libéré le 11 avril 1945; Jean Le Pluart, né le 6 juin 1920 à Mériadec, matricule 6290, incarcéré à Wittlich puis à Breslau, fut transféré au KL Flossenbürg où il était libéré le 23 avril 1945.
date de départ ignorée : Jules Péricault, né le 10 septembre 1906 à Lorient. Selon Roger Le Roux, Jules Péricault aurait été arrêté le 11 novembre 1942 pour détention d’un fusil de chasse. Incarcéré dans les prisons de Wolfenbüttel dans le Nord de l’Allemagne, de Breslau, de Brieg, d’Eger, en Tchécoslovauqie, il était transféré au KL de Flossenburg, puis à Dachau où il était libéré le 29 avril 1945.
Quelques données sur le camp de concentration de Natzweiler-Struthof dans lequel quelques 60 hommes originaires du Morbihan ont été déportés, la plupart dans le cadre de la procédure NN
Après l’Armistice du 22 juin 1940, l’Alsace et la Moselle furent annexées de fait par le III éme Reich, des fonctionnaires du Reich étant nommés pour diriger les administrations, la monnaie et le droit coutumier germanique imposés, les usines et les mines « germanisées » et l’usage du français interdit. À partir de 1942, les Alsaciens et les Mosellans furent astreints au service militaire obligatoire, dans la Wehrmacht. Himmler, chef de la Gestapo et de la police, et Oswald Pohl, chef de l’Office principal d’administration et d’économie de la SS (WVHA), voulaient créer des camps à proximité de carrières afin d’y faire travailler les déportés au profit de la Deutsche Erd und Steinwerke, DEST, la Société allemande Terre et Pierre. Cette entreprise minière SS créée par Himmler en 1938, utilisait déjà dans de tels travaux les déportés des camps de Mauthausen et de Flossenbürg. Or, au lieu-dit du Struthof, dans la commune de Natzweiler, sur le Mont-Louise, à 60 kilomètres de Strasbourg et à 8 kilomètres de la gare de Rothau, le géologue colonel SS Blumberg avait repéré , dès septembre 1940, un filon de granit rose.
Le camp fut construit à partir de la fin mai 1941 par des déportés en provenance du KL Sachsenhausen. Le KL Natzweiler, achevé en octobre 1943, comprenait 18 baraquements prévus pour contenir 4000 personnes. Les détenus furent tout d’abord utilisés pour des travaux de terrassement, de construction de routes, de nouvelles baraques. Certains détenus étaient également dispersés dans des kommandos extérieurs. A partir de mars 1944, de nombreux détenus furent affectés dans des Kommandos à la construction d’usines souterraines par exemple dans une mine appelée « Vulkan » située à Haslach, près de Fribourg, à Urbès dans le Haut Rhin pour Daimler-Benz, à Thil en Meurthe et Moselle pour l’assemblage des fusées V 2, dans la vallée du Neckar pour la Luftwaffe, vallée où furent utilisées d’anciennes galeries de mines de gypse, à Kochem au sud-ouest de Coblence dans le tunnel d’une ancienne ligne ferroviaire ou à Leonberg, près de Stuttgart dans deux tunnels aménagés en usine pour la fabrication de pièces détachées pour avions Messerschmitt.
À la demande des professeurs de médecine nazis de l’Université du Reich à Strasbourg, une chambre à gaz fut aménagée dans une petite pièce de 9 m2 à l’intérieur de l’ancienne salle des fêtes de l’auberge du Struthof, afin de procéder à des expériences médicales. Ainsi du 14 au 21 août 1943, 86 déportés juifs provenant du camp d’Auschwitz y furent gazés : les corps devaient servir à établir une collection de squelettes pour le professeur August Hirt, directeur de l’Institut d’anatomie de l’Université du Reich de Strasbourg. La chambre à gaz fut également utilisée pour l’étude de nouveaux gaz, des déportés, principalement tziganes, servant de cobayes.
La Gestapo de Strasbourg utilisait aussi le camp comme lieu d’exécution. Ainsi, en 1943, treize jeunes gens originaires de Ballersdorf dans le Haut-Rhin furent fusillés à la carrière pour avoir refusé leur incorporation dans la Wehrmacht et tenté de quitter la zone annexée. En septembre 1944, peu avant l’évacuation du camp, des membres du réseau Alliance et des maquisards des Vosges furent amenés au camp pour y être exécutés. Ainsi, dans la nuit du ler au 2 septembre 1944, une camionnette amenait au camp de Natzweiler-Struthof, jusqu’à l’aube, par groupe de 12, 106 membres du réseau « Alliance » antérieurement détenus au camp de Schirmeck, dont Jacques Stosskopf et Maurice Gillet, arrêtés à Lorient le 21 février 1944 *. Tous furent, à leur arrivée dans ce camp, exécutés d’une balle dans la nuque puis brûlés au four crématoire.
A Natzweiler, le taux de mortalité était de 40%. Dans les Kommandos annexes, il pouvait atteindre 80%. Sur les 52 000 détenus immatriculés au KL Natzweiler-Struthof entre 1941 et 1944, plus de 20 000 auraient péri dans les prisons ou les camps nazis. Au moins 1464 déportés originaires des département annexés y ont été enfermés, le plus souvent pour leur opposition aux mesures imposées par les nazis, et notamment pour leur refus du service obligatoire du travail ou de l’incorporation dans la Wehrmacht.
A partir du 31 août 1944 et jusqu’au 4 septembre, devant l’avance des armées alliées, les nazis décidèrent d’évacuer le camp principal, puis les kommandos situés en Silésie. Les survivants du camp central furent transférés vers le KL Dachau, ceux des kommandos extérieurs vers le KL Gross Rosen. Situé en Silésie, à 60 km de la ville de Breslau, le camp de Gross Rosen fut d’abord un Kommando du camp de Sachsenhausen. Il devint un camp autonome fin 1941. Les détenus y étaient astreints au travail forcé notamment dans des carrières voisines dans des conditions particulièrement mortifères. D’abord destiné aux déportés polonais et russes, le camp devint, à partir de septembre 1944, un lieu de regroupement des déportés NN, internés dans les blocs 9 et 10.
Le 24 novembre 1944, un jour après la libération de Strasbourg, une patrouille du 3 ème bataillon de la 3 ème division d’infanterie américaine pénétrait dans le camp de Natzweiler qu’elle trouvait désert. Dès 1945, les Alliés jugèrent les plus hauts responsables de l’Allemagne nazie à Nuremberg. Ils organisèrent ensuite des procès séparés pour les SS de chacun des camps principaux. Josef Kramer, ancien commandant de Natzweiler et commandant de Bergen-Belsen, fut jugé par les Britanniques pour son rôle dans ces camps, condamné à mort et exécuté en décembre 1945 . Une centaine de SS gardiens à Natzweiler, arrêtés ou en fuite, furent jugés au cours des procès de Wuppertal, de Rastatt en 1946 et de Metz en 1954, 6 d’entre eux étant condamnés à mort.
Voici les transports dans lesquels furent déportés des résistants originaires du Morbihan vers le KL Natzweiler, dont au moins 31 allaient mourir ou disparaître dans une prison ou un camp nazis.
Transports partis de Paris Gare de l’Est entre le 8 juillet et le 25 novembre 1943
Alors que depuis mai 1942, les déportés classés Nacht und Nebel étaient dirigés, après leur extraction de la prison de Fresnes contrôlée par la Werhrmacht, vers le SS Sonderlager Hinzert dans l’attente de leur jugement par les Tribunaux Spéciaux de Cologne et de Breslau, à partir du mois de juillet 1943, la plupart des déportés NN étaient dirigés vers le KL Natzweiller, contrôlé par la Gestapo. Lors du transport, les détenus étaient le plus souvent entassés dans un wagon cellulaire accroché au train pour Strasbourg, puis dans la gare de cette ville , accroché au train se rendant à Rothau, d’où les détenus étaient conduits en voiture cellulaire jusqu’au camp. Ainsi, au cours du deuxième semestre 1943, 6 transports de déportés, chacun comprenant entre 56 et 62 hommes, français pour la plupart, résistants membres de réseaux tels que CND-Castille, Hector, Overcloud ou de groupes de FTP, partirent vers ce camp. Sur ces 353 déportés, au moins 191 allaient mourir ou disparaître dans un camp nazi, dont 80 après leur transfert vers Dachau ou Gross Rosen.
Parmi ceux morts à Natzweiller ou dans une prison se trouvaient:
déporté le 11 juillet 1943: Gustave Largouet, né le 25 juillet 1899 à Auray, matricule 4482, décédé le 21 octobre 1943, il avait 44 ans.
déporté le 18 novembre 1943: Marcelin Le Bayon, né le 17 avril 1911 à Ploëmerl, matricule N° 6178, décédé dans la prison de Wolhau, en Pologne, le 19 avril 1944, il avait 33 ans.
déporté le 25 novembre 1943: Mathurin Quintin, né le 24 avril 1882 à Brech, matricule 6297, décédé le 4 mai 1944, il avait 62 ans.
Parmi ceux morts après l’évacuation de Natzweiller se trouvait:
déporté le 25 novembre 1943: Joseph Le Tily, né le 25 mars 1903 à Pluméliau, matricule 6308, après avoir été incarcéré dans les prisons de Wohlau, Breslau et de Brieg, Joseph était transféré au camp de Flossenburg où il décédait le 11 mai 1945 avant son rapatriement, il avait 42 ans.
En revanche, François Tanguy, né le 9 juin 1907 à Cléguerec, matricule N° 5976, ( transport du 11 novembre 1943), faisait partie des déportés transférés à Dachau où il était libéré le 29 avril 1945. De même, Louis Jolivet, né le 14 juillet 1924 à Gourin, matricule 6276, ( transport du 25 novembre 1943), après avoir été incarcéré à la prison de Brieg dans l’attente de son jugement, était transféré au KL Gross Rosen. Puis lorsque ce camp fut évacué entre le 8 février et 23 mars 1945 du fait d’une épidémie de typhus, Louis fut transféré à Kazmenz, l’un des Kommandos du KL Gross Rosen, et enfin vers le KL Dachau où il était libéré le 29 avril 1945.
Transports partis de Paris Gare de l’Est entre le 6 janvier et le 23 mars 1944
Après une interruption de plus d’un mois, les transports de déportés Nacht und Nebel reprenaient vers le KL Natzweiler. Ainsi, au cours du premier trimestre 1944, partirent vers ce camp 7 transports de déportés comprenant entre 30 et 67 hommes, français pour la plupart, résistants membres de réseaux tels que Johnny Ker ( 10 résistants arrêtés en Ille et Vilaine), Alliance, Galia, Défense de la France ou agents de liaison du BOA, de mouvements comme le Front National, l’Organisation Civile et Militaire, l’Armée secrète dont trois responsables nationaux, avaient été arrêtés en juin et août 1943 et déportés le 9 mars 1944. Il s’agissait du général Charles Delestraint, alias Vidal, né le 12 mars 1879, de Paul Jouffrault, et de Joseph Gastaldo. Transféré à Dachau en septembre 1944, Charles Delestraint était abattu par les SS d’une balle dans la nuque le 19 avril 1945, dix jours avant la libération du camp. 6 membres du réseau Alliance, Robert Baillet, né le 19 juin 1890, Anatole Blanc, né le 8 octobre 1894, Camille Grenet, né le 27 octobre 1895, André Mérigeaud, né le 8 juillet 1909, Laurent Morelle, né le 10 mars 1912, Gérard Perot, né le 29 novembre 1914, déportés le 25 février 1944, condamnés à mort, furent fusillés, le 12 juillet 1944, dans la prison de Ludwigsbourg, près de Stuttgart. Peu de déportés de ces convois seraient jugés par le Tribunal spécial de Breslau chargé des affaires NN.
Sur ces 372 déportés, au moins 212 allaient mourir ou disparaître dans une prison ou un camp nazi, dont 154 après leur transfert vers Dachau ou Gross Rosen.
Parmi ceux morts à Natzweiler se trouvaient :
déporté le 14 janvier 1944: André Gillard, né le 26 octobre 1904 à Lorient , matricule 6974, décédé le 8 avril 1944, il avait 39 ans.
déporté le 10 février 1944: Isidore Le Corre, né le 24 octobre 1910 à Croixanvec , matricule 6974, décédé le 5 avril 1944, il avait 33 ans. Etant sans doute en relation avec le réseau d’évasion « Pat O’ Leary » *( 5), Isidore Le Corre , travaillant dans une ferme à Saint Gonnec dans les Côtes du Nord, aurait aidé des aviateurs américains, dont l’appareil, un Boeing B 17, qui, le 29 mai 1943, rentrait d’une mission sur Saint Nazaire pour revenir à Kimbolton en Angleterre, avait été contraint à atterrissage forcé sur la lande de Carmoise, près du village de Tréhouet entre Saint Gonnec et Saint Caradec. 8 des dix hommes d’équipage avaient sauté en parachute entre Vannes et Pontivy. Au moment de l’atterrissage restaient à bord le pilote et un équipier, deux hommes auxquels Isidore remettait des vêtements civils, ses propres vêtements. Nous ignorons si les deux aviateurs ont pu échapper aux allemands. Quant à Isidore, il était arrêté le 7 septembre 1943 à Saint Caradec, incarcéré à Saint -Brieuc, puis dans les prisons parisiennes de Fresnes ou du Cherche Midi.
déporté le 23 mars 1944: Mathurin Puissant, né le 3 avril 1881 à Ruffiac, matricule 8644, décédé le 14 avril 1944, il avait 63 ans.
Transports partis de Paris entre le 6 avril et le 6 août 1944
Pendant cette période, onze transports de déportés Nacht und Nebel allaient partir d’une des gares de Paris, le plus souvent la Gare de l’Est. Ces déportés, français pour la plupart, étaient parfois des jeunes gens réfractaires au STO, arrêtés pour détention illégale d’armes ou pris dans des rafles, mais le plus souvent des résistants qui appartenaient à des groupes de FTP ou à des réseaux et mouvements qui avaient été démantelés suite à des dénonciation, comme ce fut le cas pour Centurie, Honneur et Patrie, l’Organisation Civile et Militaire, Renard lié à CND- Castille, l’Organisation de Résistance de l’Armée dont ses deux fondateurs, le Général Aubert Frère et Pierre Olleris. Ces derniers, arrêtés en juin et juillet 1943, furent déportés le 4 mai 1944, le premier mourait à Natzweiler le 13 juin 1944, le second, transféré à Dachau, était libéré le 29 avril 1945.
Sur ces 606 déportés, au moins 322 allaient mourir ou disparaître dans un camp nazi, dont 262 après leur transfert vers Dachau ou Gross Rosen.
Parmi ceux morts après l’évacuation de Natzweiler se trouvaient :
déporté le 6 avril 1944: André Ehanne, né le 9 juin 1924 à Vannes, matricule 11781, transféré à Dachau puis à Neuengamme, André était évacué de ce camp à partir de la mi avril 1945 et embarqué dans un des navires transformés en prison flottante par les SS, le Cap Arcona où se trouvaient 4 600 hommes, le Thielbeck avec 2 800 hommes, et l’Athen avec 2 000 hommes. André Ehanne mourut ainsi dans la baie de Lübeck-Neustadt , le 3 mai 1945, suite aux bombardements des navires par des avions britanniques qui ignoraient la présence des prisonniers à leur bord, il avait 19 ans.
déportés le 13 avril 1944: Yves Le Fur, né le 13 août 1896 à Lorient , matricule 11884, transféré à Dachau puis à Flossenburg, Yves était affecté au Kommando de Gröditz, situé le long de la ligne de chemin de fer Dresde-Berlin où les prisonniers travaillaient pour une aciérie: il y décédait le 26 mars 1945, il avait 48 ans; Léopold Paquet, né le 11 septembre 1914 à Theix , matricule 11897, transféré à Dachau puis au Kommando de Leonberg près de Stuggart, où les détenus travaillaient dans deux tunnels d’autoroute transformés en fabrique de pièces détachées pour les avions Messerschmitt, il y décédait le 18 novembre 1944, il avait 30 ans.
déporté le 5 mai 1944: Joseph Thépot, né le 11 mars 1921 à Belle Ile en Mer, matricule 13878, transféré à Dachau puis à Mauthausen, et enfin à Ebensee, l’un des Kommandos de Mauthausen, où les détenus travaillaient à construire des usines souterraines dans 14 tunnels creusés dans la montagne, il y décédait le 21 avril 1945, il avait 24 ans.
déportés le 7 juillet 1944: Pierre Le Mee, né le 6 septembre 1899 à Hennebont, matricule 19390, transféré à Dachau puis à Mauthausen, et enfin à Nordhausen, Kommando du camp de Dora, où, à partir de 1945, étaient transférés les déportés inaptes au travail : il y décédait le 13 mars 1945, il avait 45 ans; Marcel Roger, né le 12 janvier 1923 à Quistinic, matricule 19404, transféré au KL Dachau puis au KL Flossenburg : il y décédait à une date ignorée, il avait 21 ans lors de sa déportation.
déporté le 28 juillet 1944: Pierre Canolle, né le 26 janvier 1894 à Vannes, matricule 20179, transféré à Dachau , il y décédait le 7 mars 1945, il avait 51 ans.
déporté le 6 août 1944: dans le dernier transport de détenus NN parti de la Gare de l’Est, Joseph Tanguy, né le 20 mars 1900 à Quistinic , matricule 22240, transféré à Dachau puis à Flossenburg, il y décédait le 3 mars 1945, il allait avoir 45 ans.
En revanche, François Le Ray, né le 23 décembre 1921 à Vannes, matricule N° 11797 ( transport du 6 avril 1944) faisait partie des déportés transférés à Dachau où il était libéré, le 29 avril 1945, comme Pierre Guehenec, né le 20 novembre 1923 à Quistinic, matricule N° 19379 ( transport du 7 juillet 1944), Joseph Gauter, né le 2 juin 1905 à Brech, matricule N° 20197 ( transport du 28 juillet 1944), Emile Thépaut, né le 10 septembre 1924 à Locmiquelic, matricule N° 22239 ( transport du 6 août 1944); André Cojan, né le 18 mai 1926 à Bubry, matricule 13843 et André Le Garrec, né le 5 novembre 1920 à Bubry, matricule 13856, ( transport du 4 mai 1944) étaient, eux, transférés au camp de Sachsenhausen où ils étaient libérés fin avril 1945. Ces deux derniers jeunes hommes appartenaient au groupe F.T.P Vaillant Couturier *(6), et avaient été arrêtés le 10 décembre 1943 suite à différents sabotages, avec 6 camarades qui, plus âgés, condamnés à mort, avaient été eux exécutés, le 25 février 1944, au Polygone de Vannes . Quant à Georges Brouillard, né le 18 juin 1924 à Ploërmel , matricule 13840, transféré également à Dachau, nous ignorons s’il est revenu de déportation.
Convois partis de diverses prisons françaises entre le 20 juillet et le 31 août 1944
Au cours de l’été 1944, compte tenu de l’avance des armées alliées, les autorités allemandes décidèrent d’organiser des transports d’évacuation, à partir du regroupement de personnes, soit retenues dans centres d’internement où se trouvaient notamment des familles juives, soit incarcérées dans des prisons françaises. De grands convois regroupant souvent hommes, femmes et enfants furent formés.
Ainsi, le 20 juillet 1944, 10 résistants étaient extraits de la prison Pontaniou de Brest et placés dans un wagon accroché à un train transportant des munitions et du matériel militaire. Ce train passait par La Roche sur Yon, La Rochelle et Poitiers embarquant 66 autres prisonniers en passant dans ces villes. Toutefois, avant Poitiers, à St Benoît, le 9 août 1944, 6 prisonniers brestois parvenaient à s’évader, Jules Audren, né le 19/08/1918, Pierre Fagon, né le 26/02/1908, Jean-Pierre Kersalé, né le 07/09/1928, Armand Le Bour, né le 07/12/1913, Joseph Nédelec, né le 25/03/1894 et Guy Peron, né le 11/03/1919. Avant de quitter Poitiers le 12 août , les nazis embarquaient 7 FTP arrêtés en Vendée. Puis le train se dirigeait vers Dijon, en passant par Tours, Bourges, et Nevers. A Dijon, le 18 août, 19 autres résistants étaient embarqués. Le convoi parvenait à Natzweiler, le 19 août 1944. A la fin du mois d’août, 62 déportés étaient transférés au Kommando de Schömberg, les autres étant évacués vers Dachau début Septembre 1944.
Sur ces 98 déportés, au moins 38 allaient mourir ou disparaître dans un camp nazi. Parmi eux, Edouard Le Roux, né le 6 janvier 1899 à St Martin des Champs (29), matricule 22781, transféré dans le Kommando de Schömberg, dans le Wurtemberg, il y décédait le 26 janvier 1945, il avait 46 ans; François Quezedé, né le 5 juillet 1905 à Crozon (29), matricule 22792, transféré au Kommando de Vaihingen, dans lequel fin 1944, les SS abandonnaient à leur sort les détenus malades, il y décédait le 23 novembre 1944, il avait 39 ans.
Le 3 août 1944, à Rennes, les allemands évacuaient plus de plus de 600 prisonniers politiques, et des centaines de prisonniers de guerre de la prison Jacques Cartier, et du camp de détention de Margueritte, prison et camp où les polices allemandes avaient regroupé la plupart des résistants arrêtés en Bretagne. Parmi ces résistants se trouvaient notamment des combattants du maquis de Loudéac, des membres des Corps Francs Vengeance d’Ille et Vilaine, du réseau Alliance, des agents du BOA du Morbihan, et aussi des civils arrêtés par représailles dans les rafles qui faisaient suite aux actions armées de la résistance, et notamment à Pont-Réan en Guichen en Ille et Vilaine, à Sainte Anne des Bois et à Josselin dans le Morbihan ( 7). Tous furent embarqués en train en direction de Nantes où d’autres détenus étaient emmenés, le train continuant son trajet vers l’Est. Entre le 3 et le 6 août, plusieurs prisonniers parvinrent à s’échapper, plus particulièrement le 6, à Langeais, (Indre-et-Loire), lorsque l’aviation anglaise bombarda le convoi provoquant la destruction d’un pont et l’immobilisation du convoi. Si une centaine de déportés purent s’enfuir, 18 furent tués et 70 blessés.
Réussirent à s’évader 17 jeunes gens originaires des Côtes du Nord, 33 du Finistère, 14 d’Ille et Vilaine et 5 du Morbihan: Hubert Crévic *, né le 26/09/1909 à St-Gonnery, Francis Le Drogo, né le 07/03/1905 à Pontivy, Marcel Le Drogoff, né le 08/04/1921 à Noyal Muzillac, Joseph Morice, né le 06/09/1919 à Plumelec, Joseph Nicol, né le 03/11/1919 à Plumelin. Malheureusement, Marcel Le Drogoff, ( 23 ans) repris, fut fusillé à Saint Marc du Désert, le 4 août 1944, ainsi que Pierre Gauthier, né le 18 avril 1925 à Morlaix ( 29), Jean Marie L’Azou, né le 24 décembre 1913 à Cléder ( 29), Robert Thouement, né le 14 janvier 1923 à Plouagat ( 22). Selon Roger Le Roux, aurait également fait partie de ce convoi , bien que ne figurant pas sur la liste I 273 bis du livre Mémorial, René Jehanno , membre de l’Etat major des FTP du Morbihan, puis devenu inter-régional, arrêté le 22 janvier 1944 au Mans, qui aurait également réussi à s’évader à Langeais.
A Langeais, les prisonniers qui n’avaient pu s’évader, étaient emmenés à Saint-Pierre-des-Corps, les femmes en camion et les hommes à pied, où un autre train les attendait. Le trajet se poursuivait en passant par les gares de Vierzon, Bourges, Nevers, Moulins, Dijon, Besançon et Belfort où le convoi arrivait le 15 août. Apparemment, les allemands avaient alors donné la priorité aux convois militaires se dirigeant vers les zones de combat de l’Ouest, ce qui provoquait un encombrement des voies ferrées qui aurait entraîné un arrêt provisoire de ce convoi et un internement des déportés au Fort Hatry à Belfort.
Le 26 août 1944, 278 hommes de ce convoi étaient conduits au KL Natzweiler d’où ils étaient pour la plupart évacués, dès le 4 septembre, vers le KL Dachau, et, de là, dispersés dans des Kommandos ou d’autres camps.
134 déportés de ce convoi allaient périr ou disparaître dans un camp nazi .
Parmi eux:
décédait à Allach, Kommando du KL Dachau ( usine BMW): le 1 février 1945, Constant Vinet, né le 11 janvier 1906 à Quiberon , matricule 24064, il avait 39 ans;
décédaient à Groditz, Kommando du KL Flossenburg ( aciérie): le 25 février 1945, Georges Kérangoarec, né le 4 mai 1923 à Lorient, matricule 23927, il avait 21 ans; le 26 mars 1945, Emile Leclanche, né le 17 décembre 1922 à Quistinic, matricule 23947, il avait 22 ans ;
décédait à Hannover, Kommando du KL Neuengamme : le 22 février 1945, Emile Audran*, né le 18 mars 1904 à Hennebont , matricule 23807, il avait 40 ans;
décédaient à Haslach, Kommando du KL Natzweiller: Emile Guillas, né le 3 février 1925 à St Philibert, matricule 23896, il avait 19 ans ; le 17 décembre 1944, René Le Barn, né le 10 avril 1922 à Ste Anne d’Auray, matricule 23946, il avait 22 ans;
décédait en baie de Lubëck- Neustadt :le 3 mai 1945, Jean Martin, né le 24 novembre 1913 à Lorient, matricule 23967, il avait 31 ans;
décédaient à Melk, Kommando du KL Mauthausen ( construction d’une usine souterraine): le 15 novembre 1944, Jean Alanic, né le 15 novembre 1905 à Gouarec, matricule 23810, il avait 39 ans; le 31 décembre 1944, Paul Conan, né le 5 avril 1912 à Locminé , matricule 23857, il avait 32 ans; le 11 décembre 1944, Henri Ethoré, né le 23 août 1906 à Moréac, matricule 23872, il avait 42 ans;
décédait à Neuengamme : Edmond Peresse, né le 20 novembre 1920 à Languidic, matricule 24013, arrêté avec son frère Albert, au cours d’une rafle, le 3 juillet 1944, à Locminé, alors qu’ils transportaient du tabac pour le remettre à des maquisards. Albert était fusillé, Edmond mourait le 28 février 1945, il avait 24 ans;
décédait à Vaihingen, Kommando du KL Natzweiller, transformé en mouroir: le 21 février 1945, Jean Rio, né le 23 juin 1922 à Ploërmel , matricule 24025, il avait 22 ans;
En revanche, originaires du Morbihan, revenaient de déportation :
libérés à Allach : le 30 avril 1945, Roger Gicquel, né le 25 août 1922 à La Trinité Surzur, matricule 23906; Joseph Le Houarner, né le 27 avril 1921 à Lorient, matricule 23930 et Roger Querré, né le 23 août 1923 à Locmiquélic, matricule 24022: ces deux jeunes gens avec leur camarade Paul Plunian, né le 10 février 1924 à Lorient , matricule 24021, libéré lui à Buchenwald le 11 avril , avaient été arrêtés par la feldgendarmerie pour avoir transporté des armes jusqu’au maquis de Saint Marcel; Marcel Ollivier, né le 26 avril 1909 à Vannes, matricule 23998; André Rivière, né le 27 juillet 1921 à Vannes , matricule 24023; Louis Thomas, né le 20 décembre 1919 à Locmiquélic, matricule 24056;
libérés à Dachau : le 29 avril 1945, Paul Bodet, né le 20 mai 1914 à Gourin , matricule 23822; Jean Brabant, né le 22 octobre 1925 à Priziac, matricule 23821;
libéré à Ebensee : le 6 mai 1945, Roger Méaudé, né le 26 octobre 1916 à La Chapelle, matricule 23993;
libéré à Mauthausen :le 5 mai 1945, Jean Ligonday, né le 1 novembre 1907 à Lorient, matricule 23945;
libéré à Melk : le 6 mai 1945, Henri Alain, né le 28 août 1922 à Josselin , matricule 23802.
Le 11 août 1944, les allemands évacuaient 222 hommes de la prison de Lyon Perrache pour les conduire à Natzweiler , d’où la plupart seraient transférés à Dachau. Parmi les déportés de ce convoi qui allaient périr dans un camp nazi se trouvaient François Dagorn, né le 25 mars 1898 à Lopérec (29), matricule 22555, Aimé Le Bouler, né le 10 juillet 1910 à Ile aux Moines (56), matricule 22608, Robert Richard, né le 4 février 1919 à Brest (29), matricule 22665. François Dagorn décédait à Melk, le 30 janvier 1945, il avait 46 ans. Aimé Le Bouler décédait au Kommando de Dautmergen, le 1 décembre 1944, il avait 34 ans. Robert Richard décédait à Ebensee, le 28 janvier 1945, il avait 26 ans.
Le 19 août 1944, les allemands évacuaient 264 hommes de la prison de Charles III de Nancy pour les conduire à Natzweiler, d’où la plupart seraient transférés à Dachau. Parmi les déportés de ce convoi qui allaient périr dans un camp nazi se trouvaient Hypolite Marion, né le 2 mars 1922 à Dinard (35), matricule 23014, et Julien Sagalle, né le 17 décembre 1900 à Brest (29), matricule 23084. Hypolite Marion décédait à Melk, le 8 février 1945, il avait 22 ans. Julien Sagalle décédait au Kommando de Schömberg, le 17 décembre 1944, il avait 44 ans.
Le 20 août 1944, les allemands évacuaient 239 détenus hommes détenus dans une caserne à Clermond Ferrand et les entassaient dans un train qui prenait la direction de Belfort. Dans cette ville, 66 détenus de la prison d’Epinal et 77 de la prison de Nancy étaient également embarqués dans un wagon accroché au train venant de Clermont. Ces 382 hommes arrivaient à Natzweiler le 30 août 1944, 175 d’entre eux allaient périr dans un camp nazi , dont Jacques Legleut, né le 15 juillet 1904 à Plouay, et André Mounier, né le 18 janvier 1918 à St Malo (35). Jacques Legleut décédait à Haslach, le 28 octobre 1944, il avait 40 ans. André Mounier décédait à Dachau, à une date ignorée, il avait 24 ans à son arrivée dans ce camp. En revanche, était libéré à Gusen, le 5 mai 1945, Jean Lacroix, né le 15 novembre 1896 à la Roche Bernard.
Le 26 août 1944, les allemands évacuaient 129 hommes de la prison de Chalon sur Saône pour les conduire à Natzweiler, d’où, pour la plupart, ils étaient transférés à Dachau. Si 67 déportés de ce convoi allaient périr dans un camp nazi, Théodore Ihuel, né le 14 septembre 1924 à Lorient, matricule 24129, et Paul Sichez, né le 24 février 1916 à Vannes, matricule 24192, revenaient de déportation.
Le 27 août 1944, au village de Pexonne, en Meurthe et Moselle, les allemands, aidés de membres de la milice, opéraient une rafle en représailles à l’aide apportée par les habitants du village aux combattants du maquis voisin. 79 hommes étaient déportés vers le camp de Natzweiller où ils arrivaient le 31 août 1944. 63 d’entre eux allaient périr dans un camp nazi, dont Eugène Le Gal, né le 20 août 1908 à Languidic, matricule 26848, décédé le 30 novembre 1944 à Melk: il avait 36 ans.
Voici les transports dans lesquels furent déportés, en 1943, vers des prisons du Reich, des résistants originaires du Morbihan , la plupart d’entre eux relevant de la procédure NN
Rappelons que les transports partant de prisons françaises, situées dans les zones Nord et Sud occupées, vers les prisons du Reich ont concerné au moins 8 700 déportés. Selon l’importance de la peine à effectuer, les déportés étaient incarcérés en Allemagne dans divers types de prison, prison ordinaire pour les détentions courtes, prisons d’exécution de peine de travaux forcés, incarcération dans des prisons attachées à un Tribunal pour les déportés relevant de la procédure NN. Au cours de l’année 1943, dans le cadre de la procédure NN, plusieurs convois partaient de Paris, gares du Nord et de l’ Est, les femmes devant être convoyées vers la prison d’Aix La Chapelle, les hommes dans diverses prisons pour être jugés par les Tribunaux spéciaux de Cologne ou de Breslau chargés de juger les déportés NN. Après l’abrogation de la procédure «Nacht und Nebel », en septembre 1944, les déportés « NN » étaient transférés dans des camps de concentration, mais aussi des déportés remis à la Gestapo alors que leur peine d’incarcération était achevée, leur déportation se faisant alors au nom de la détention de sécurité. A notre connaissance, sur les 18 déportés originaires du Morbihan, 3 ont péri en Allemagne.
déportée NN le 8 janvier 1943, vers la prison d’ Aix la Chapelle, Marguerite Chabauty, née le 10 mai 1874 à Pontivy, puis incarcérée dans les prisons de Trèves, et Jauer, Marguerite Chabauty était transférée à Ravensbrück, où elle décédait le 06 mars 1945: elle avait 71 ans.
déporté le 15 février 1943, vers la prison de Karlsruhe, Gabriel Stéphant, né le 9 juillet 1907 à Lanester, était transféré dans les prisons de Rheinbach et de Siegburg, puis au Kommando de travail dépendant de cette prison à Troisdorf, près de Cologne et enfin au camp d’Honnef, fabrique de conserves situé près de Siegburg, où il était libéré le 6 avril 1945.
déporté le 1 mars 1943, vers la prison de Karlsruhe, Victor Caro, né le 6 mars 1920 à Ploërmel, était transféré dans la prison de Saarbrucke , puis au pénitencier de Bayreuth, situé au nord de Nuremberg, où il était libéré à une date indéterminée .
déportés à partir de la Tunisie courant avril 1943: à partir de novembre 1942, les troupes allemandes occupèrent la Tunisie pour contrer le débarquement anglo-américain en Algérie et au Maroc. 64 hommes et 17 femmes arrêtés pour faits de résistance détenus par la Gestapo dans la prison de la Kasbah à Tunis allaient ainsi être transportés par avion jusqu’en Italie puis par train vers les prisons allemandes pour être jugés. Parmi ces hommes se trouvaient : Gustave Le Floch, né le 22 décembre 1921 à Lomener . Inscrit maritime dès l’âge de 14 ans, Gustave aurait été embauché au service des Travaux Maritimes de Lorient à la fin des années 30. Arrêté à Tunis, il aurait été interné au camp de Sachsenhausen et exécuté le 30 juillet 1943 au pénitencier de Brandenburg -Görden: il avait 22ans. Robert Le Moustre, né le 24 février 1926 à Lorient. D’abord incarcéré dans une des prisons de Berlin, Robert était transféré au KL de Sachsenhausen puis au Kommando de Falkensee où il était libéré à une date non déterminée.
déporté le 15 juillet 1943 vers la prison de Fribourg, Gaston Maury, né le 27 septembre 1904 à Lorient, transféré dans la prison de Bochum, dans la Ruhr, il était libéré le 2 juillet 1944.
déportée le 22 juillet 1943 vers la prison de Fribourg, Marie-Anne Le Guenédal, née le 21 mars 1910 à Baden, était transférée dans diverses prisons d’exécution des peines à Lubeck, Dordmund , Gutersloh et Witten où elle était libérée à une date indéterminée.
déportées NN le 5 août 1943, vers la prison d’ Aix la Chapelle, Anne Milon, née le 05 décembre 1875 à Plessana ( 22), était transférée au KL Ravensbrück où elle décédait, le 08 décembre 1944, elle avait 69 ans; Marguerite Reneze-Emery, née le 24 avril 1893 à Lorient, qui, après avoir été transférée dans diverses prisons d’exécution des peines à Breslau, Jauer, Golberg, était incarcérée à Aichach près de Munich d’où elle était libérée le 29 avril 1945.
déporté NN le 21 septembre 1943, vers la prison de Karlsruhe, Emile Le Dref, né le 3 février 1900 à Lorient, était transféré dans une prison proche de Francfort, puis dans les KL Sachsenhausen et Mauthausen, où il décédait le 13 mars 1945, il avait 45 ans.
déportée NN le 27 septembre 1943, vers la prison de Karlsruhe, Raymonde Vadaine, né le 28 décembre 1914 à Lorient , était transférée dans la prison d’ Aichach , où elle était libérée le 29 avril 1945.
déportés le 29 septembre 1943, vers la prison de Karlsruhe, Jean Bordeaux, né le 10 octobre 1912 à Vannes, était transféré dans les prisons de Bochum, Willitch puis Dieburg-Rodgau , où il était libéré en mars 1945; Joseph Le Botlan, né le 28 janvier 1909 à Cléguerec, était transféré dans les prisons de Bochum, de Rollwald, Wiesbaden près de Francfort sur le Main, et enfin de Hosch, où il était libéré le 26 mars 1945.
déporté le 25 octobre 1943, vers la prison de Karlsruhe, Pierre Guillaume, né le 15 septembre 1910 à Malestroit, était transféré dans une prison proche de Francfort où il était libéré à une date non déterminée.
déporté le 28 octobre 1943, vers la prison de Karlsruhe, Emmanuel Le Lamer, né le 20 août 1889 à Belz, était transféré dans une prison de Sarrebruck où il était libéré à une date non déterminée. Selon Roger Le Roux dans « Le Morbihan en Guerre », Emmanuel Le Lamer avait été arrêté dans les circonstances suivantes : le 6 septembre 1943, le thonier « Saint-Guénen » revenait au port d’Etel avec trois aviateurs recueillis le 3 en mer. Environ 150 personnes, massées le quai avaient crié : « Hourra ! Vive les Anglais, A bas les Allemands » avant d’être dispersées par les douaniers allemands. Au moment où les aviateurs montaient dans un autocar, une fillette s’approchait pour remettre à l’un d’eux un paquet de gâteaux. Un soldat, d’un geste de fureur, jetait les gâteaux sur la chaussée, ce qui provoquait une nouvelle manifestation d’opposition à l’occupant. Quatre jours plus tard, l’armée allemande organisait une opération d’intimidation. Le 10 septembre , à 6 h 15, 300 feldgendarmes et hommes de troupe cernaient Etel : tous les hommes de plus de 16 ans — environ 1 500 — étaient arrêtés et conduits au lieu dit « La Falaise » pour vérification d’identité. Tous étaient relâchés quatre heures plus tard . Toutefois, le 18 septembre, Emmanuel Le Lamer, demeurant alors à Belz, était arrêté pour avoir joué un rôle actif lors de la manifestation du 6 et condamné à une peine de travaux forcés à effectuer en Allemagne.
déportée NN le 15 novembre 1943,vers la prison d’ Aix la Chapelle, Marguerite Le Solleu, née le 16 janvier 1898 à Etel, était transférée ensuite dans les prisons de Trèves, Cologne, villes où siégeait un Tribunal pour déportées NN, puis vers celle de Magdeburg, et enfin de Berlin. Après l’abrogation de la procédure NN, elle était transférée au KL Ravensbrïck, puis à Mathausen où elle était libérée le 28 avril 1945 par la Croix Rouge.
déporté le 27 novembre 1943, vers la prison Saint Gilles à Bruxelles, puis celle de Löwen en Belgique, lieux de détention d’otages communistes arrêtés dans le Pas de Calais, René Coeffie, né le 23 février 1923 à Lorient, était transféré, après condamnation, dans les prison d’ Aix La Chapelle, et d’ Hagen où il était libéré à une date non déterminée.
déportés en décembre 1943. Au cours de ce mois de décembre au moins 65 hommes étaient transférés pour purger leur peine en Allemagne dans des trains de voyageurs, sous la garde de feldgendarmes directement de prisons françaises, notamment Nantes et Vannes, vers les prisons du Reich, dont plusieurs devenaient des lieux de travail forcé ou des annexes de Kommandos fournissant la main d’oeuvre détenue à des usines proches, afin de pourvoir aux exigences de main d’oeuvre nécessaire pour remplacer les ouvriers allemands mobilisés sur les différents fronts . 3 jeunes hommes originaires de Le Faouët, condamnés pour avoir peint des croix gammées et des croix de Lorraine sur les murs des maisons de collaborateurs, étaient ainsi extraits le 20 décembre 1943 de la prison de Vannes pour être incarcérés tout d’abord dans la prison de Karlsruhe: Robert Le Guilchet, né le 2 février 1926 transféré dans les prisons d’Anrath dans la Rhur, puis de Dusseldorf où il était libéré le 17 avril 1945; Léon Le Rouzic, né le 28 octobre 1922, transféré à Bochum, où il était libéré le 6 avril 1945; Pierre Ropers, né le 11 mai 1927, transféré à Wolfenbüttel, prison à partir de laquelle les détenus étaient affectés à une fabrique de conserves, il était libéré le 23 avril 1945.
Transports partis en décembre 1943 et janvier 1944 de la Gare de l’Est à Paris ou de prisons françaises emportant, vers diverses prisons du Reich, les membres du Réseau Alliance *
A partir de Septembre 1943, le réseau de renseignements Alliance mis en place sur tout le territoire français par Georges Loustaneau-Lacau, Léon Faye et Marie-Madeleine Fourcade subissait des vagues d’arrestations qui conduisirent à la déportation, entre décembre 1943 et janvier 1944, de 114 hommes et de 14 femmes qui, pour la plupart, condamnés à mort par les tribunaux militaires allemands allaient être fusillés, ou, sans avoir été jugés, assassinés au cours de l’année 1944. Seuls échappaient à la mort 4 des membres du réseau sur les 14 qui, condamnés à des peines de travaux forcés, avaient été transférés dans des camps de concentration. Ainsi, originaires de Bretagne, condamnés à mort, furent fusillés:
Le 21 août 1944 à Heilbronn, après avoir été extraits de la prison de Schwäbisch-Hall sise près de Stuttgart: Raymond Hermer, né le 29 décembre 1903 à Rennes (35): il avait 40 ans; Yves Rigoine de Fougerolles *, né le 6 juillet 1913 à la Trinité sur Mer (56): il avait 31 ans et Lucien Poulard, né le 2 décembre 1917 à Redon (35): il avait 26 ans .
Etaient exécutés dans des prisons du Reich,
le 23 novembre 1944 à Kehl, Armand Troudet*, né le 24 février 1903 à Lorient: il avait 41 ans;
le 24 novembre 1944 à Rastatt, Léon Mury , né le 21 novembre 1920 à St Malo ( 35): il avait 24 ans;
le 30 novembre 1944 à Pforzheim, Alice Coudol née le 10 février 1923 à Brest (29), elle avait 21 ans; Marie-Jeanne Le Bacquet, née le 4 août 1884 à Brest (29), elle avait 60 ans; Marguerite Premel, née le 5 mai 1906 à Brest ( 29), elle avait 38 ans.
Transports partis de juin à août 1944 de la Gare de l’Est à Paris ou de diverses prisons françaises emportant 20 déportés NN originaires du Morbihan vers diverses prisons du Reich dont 3 allaient mourir dans un camp nazi
Au cours de l’année 1944, dans le cadre de la procédure NN quelques convois partaient de la Gare du Nord, les femmes devant être convoyées vers la prison d’Aix La Chapelle, les hommes dans diverses prisons, pour être jugés par les Tribunaux spéciaux de Cologne ou de Breslau. En revanche, des hommes originaires du Morbihan, paraissent avoir été déportés après avoir été condamnés, sans doute, entre le 10 février et le 30 juillet 1944 par un Tribunal militaire siégeant à Auray, Lorient, Le Faouët, Port Louis, Quimperlé ou Vannes.
Voici les transports dans lesquels se trouvaient des déportés originaires du Morbihan dirigés tout d’abord vers la prison de Karlsruhe:
déporté en juin 1944, Eugène Toumelin, né le 12 juillet 1895 à Riantec, arrêté, le 2 mars 1944, à Port Louis, suite à une dénonciation, pour attitude anti-allemande, était transféré dans la prison d’exécution des peines de travaux forcés de Rheinbach, et enfin à Hameln, près d’Hanovre, où il était libéré le 29 janvier 1945.
déporté le 2 juillet 1944, Jean Hascoat, né le 9 mars 1889 à Guiscriff , était transféré dans la prison de Wolfenbüttel, dans le Nord de l’Allemagne, où il était libéré le 11 avril 1945.
déportés le 15 juillet 1944, Arthur Méance, né le 13 août 1920 à Naizin , était transféré dans la prison de Francfort sur le Main, puis dans celle d’ Amberg, près de Nuremberg, où il était libéré le 27 avril 1945; Jean Ulliac, né le 19 mai 1923 à Lanvenegen, était transféré dans les prisons de Rheinbach et d’ Hameln, où il était libéré le 7 avril 1945.
déportés le 27 juillet 1944, Louis Hanvic, né le 16 octobre 1925 à Lanvenegen, était transféré dans les prisons de Rheinbach, et de Griebo près de Berlin , où il était libéré le 23 avril 1945; Alphonse Moreau, né le 14 janvier 1909 à Lanvenegen, était transféré dans les prisons de Rheinbach, d’ Hameln puis dans celle de Bernau, près de Berlin, il était libéré en Suisse le 1 mai 1945.
déportés le 3 août 1944, Roger Allanic, né le 27 février 1921 à Cléguerec, était transféré dans les prisons d’exécution des peines de Rheinbach, et de Diez Lahn, près de Coblence, où il était libéré le 6 mai 1945 ; Louis Bogard, né le 14 février 1917 à Silfiac, était transféré dans les prisons de Rheinbach, de Kassel, puis dans celle de Bernau, où il était libéré à une date non connue, ce qui était aussi le cas de Théodore Le Dortz, né le 6 mai 1926 à Quistinic (8) ; Marcel Le Fur, né le 20 septembre 1923 à Cléguerec, était transféré dans la prison de Rheinbach, puis dans celle de Siegburg près de Bonn, où il était libéré le 18 mars 1945.
déporté le 8 août 1944, André Kerleau, né le 27 décembre 1920 à Billio, était transféré dans la prison de Rheinbach puis celle de Wittlich, près de Cologne, où il était libéré à une date non déterminée.
dates de déportation ignorée : Augustin Baud’huin, né le 8 août 1889 à Lorient, incarcéré dans la prison de Francfort sur le Main puis dans celle de Kassel, Augustin était transféré au KL Buchenwald, puis au KL Dora et enfin à Bergen -Belsen où il était libéré le 15 avril 1945 ; Eugène Bogard, né le 16 août 1921 à Bubry, incarcéré dans la prison de Karlsruhe, puis transféré à celle de Rheinbach, près de Bonn, lieu d’exécution des peines de travaux forcés, et enfin à celle de Kassel, on ignore si Eugène est revenu de déportation, ce qui est aussi le cas de Victor Le Lay, né le 15 février 1914 à Vannes ; Armand Falquero, né le 27 mars 1920 à Caudan , incarcéré à la prison de Rheinbach, puis transféré à celle de Kassel, il était libéré en mai 1945 ; Louis Glajean, né le 21 octobre 1910 à Arzon, incarcéré à la prison de Rheinbach , puis à celle de Wittlich, il était transféré au KL Buchenwald où il était libéré le 11 avril 1945 ; Marie Guichard, né le 8 septembre 1891 à Bangor, incarcérée dans une prison de Breslau, condamnée à une peine de travaux forcés qu’elle commençait à exécuter dans la prison de Jauer réservée aux femmes. Début 1945, elle était transférée au KL Ravensbrück et enfin au KL Mauthausen où elle décédait le 15 mars 1945, elle avait 43 ans ; Jean Lavenant, né le 12 novembre 1903 à Pluméliau, il disparaissait dans un camp vraisemblablement celui de Buchenwald; Marie Lorgeoux, né le 16 février 1906 à Questembert, incarcérée en détention préventive dans la prison de Lauban près de Breslau, elle était transférée au KL Ravensbrück, puis à celui de Mauthausen et enfin à Bergen Belsen, où elle décédait le 23 avril 1945, elle avait 39 ans ; Roger Porcher, né le 11 février 1924 à Ferel , incarcéré à la prison de Rheinbach puis à Kassel où il était libéré à une date non déterminée.
Récapitulatif établi par Katherine Le Port
à partir des renseignements contenus
dans les listes et notices du Livre Mémorial publié par la Fondation de la Mémoire de la Déportation,
en ligne sur le site « Le livre mémorial de la déportation »,
et dans le livre « Morbihan en guerre » de Roger Le Roux.
Nous reviendrons ultérieurement sur le parcours de certains des résistants de Bretagne, évoqués ci-dessus. Si vous voyez des inexactitudes, merci de nous en informer; si vous souhaitez voir mettre en ligne sur notre site des documents, photographies ou un hommage personnel à la mémoire de l’un ou l’autre des patriotes évoqués, merci de nous les transmettre. [email protected]
* : voir notice ultérieure sur notre site
(1) Cet « engagement » de Vichy pouvait s’appuyer sur la politique d’internement des étrangers menée par la 3 ème République finissante. Rappelons en effet que le décret pris par le gouvernement Daladier, le 1 septembre 1939, prévoyait en cas de conflit armé, « le rassemblement dans des centres spéciaux de tous les étrangers de sexe masculin ressortissant de territoires appartenant à l’ennemi » âgès de 17 à 50 ans. Le 5 septembre, un communiqué leur demandait de rejoindre immédiatement les centres de rassemblement, mesure rappelée par deux circulaires de mai 1940, prévoyant le rassemblement de tous les ressortissants allemands âgés de 17 à 65 ans. Ainsi en juin 1940, quelques six cents réfugiés politiques allemands et autrichiens jusqu’alors internés en région parisienne étaient transportés jusqu’à Audierne pour être internés au camp situé près de Poulgoazec. Lors de l’arrivée des allemands en Bretagne, si quelques uns parvinrent à s’enfuir, ( voir le récit de Soma Morgenstern « Errance en France ») la plupart des réfugiés étaient livrés à l’armée allemande.
(2) les citations d’Oberg proviennent de l’ouvrage de Denis Pechanski «Les années noires»;
(3) La Sipo ou Sicherheitspolizei se divise en une police criminelle chargée des crimes de droit commun, la Kripo, et une police politique Geheime Staatspolizei dite Gestapo, chargée notamment du suivi des internés politiques des camps de concentration. Au sein du parti nazi, les S.S possédaient aussi un service de sécurité le S.D ou Sicherheitsdients, service de renseignements chargé de surveiller les «ennemis » du Reich. Tous ses services seront réunis à partir de 1939 dans l’Office Principal de Sécurité du Reich, le RSHA, sous les ordres de Reinhard Heydrich. Seule la police du maintien de l’ordre dite Orpo reste en dehors du RSHA. Pour différencier cette police «ordinaire», des polices politiques on désigne aussi ces dernières sous le sigle Sipo-SD.
(4) Nous reprendrons au résistant Claude Bourdet la distinction qu’il établit dans son livre «L’Aventure incertaine » p 96 entre réseau et mouvement « Un réseau, c’est une organisation créée en vue d’un travail militaire précis, essentiellement le renseignement, accessoirement le sabotage, fréquemment aussi l’évasion de prisonniers et surtout de pilotes tombés chez l’ennemi…Un mouvement, au contraire, a pour premier objectif de sensibiliser et d’organiser de la manière la plus large possible. Bien entendu, il a aussi des objectifs concrets…C’est avant tout par rapport à la population qu’il entreprend ces tâches. C’est elle qui est son objectif et sa préoccupation profonde… » ;
(5) Témoignage de Louis Le Du sur le groupe Vaillant Couturier : N°118 de la revue Ami Entends-tu ;
(6) voir le témoignage de Jean-Raymond Brabant dans son livre « La Rafle de Sainte-Anne- des -Bois», récit publié en août 1995 par la Collecton « Libre Expression » ;
(7) Souvenirs de Louis Manach sur le réseau « Pat O’Leary »( – groupe de Rostrenen Carhaix), et le traître Roger Le Neveu dans les numéros 79 et 82 de la revue Ami Entends-tu ;
(8) voir le témoignage de Théodore Le Dortz sur la détention dans la citadelle de Port Louis dans le livre de Roger le Roux, déjà cité, et des indications sur le Tribunal siégeant dans cette ville et la Cour martiale du Faouët, ( pages 507/508), témoignage repris dans le numéro 157 de la revue Ami Entends-tu ;
Les revues Ami Entends-tu sont en ligne sur le site « Les Amis de la Résistance du Morbihan».